Par Damien Richard
Une introduction en bourse, ou IPO (Initial Public Offering) est une opération financière visant pour une entreprise la cotation de titres de capital, c’est-à-dire d’actions, sur un marché boursier. Le capital de l’entreprise devient ainsi ouvert aux investisseurs. Généralement, cette opération s’accompagne d’une augmentation de capital qui est un des objectifs de l’introduction en bourse.
Le climat général des introductions en bourse est très volatil ces deux dernières années. Après une augmentation considérable des opérations d’introduction en bourse en 2021, le premier semestre 2022 marque une chute brutale du nombre d’opérations et des montants levés sur les marchés. Quels sont donc les facteurs qui sous-tendent cette évolution ?
2021, une année historique
L’année 2021 s’est caractérisée par une forte hausse des introductions en bourse et des montants levés. Selon PwC, pas moins de 2 682 introductions en bourse ont été enregistrées, pour un montant total de 608 milliards de dollars, soit 278 milliards de plus qu’en 2020. Le continent américain a contribué à plus de la moitié des IPO (57 %), tandis que la région Europe, Moyen-Orient et Afrique (EMEA) a fait état de 459 opérations. Sur les places européennes, le nombre d’IPO a plus que doublé par rapport à 2020.
Ce qui explique cette tendance, c’est d’abord la bonne performance des actions sur les marchés en 2021 et la faible volatilité des titres. Les IPO demandent des longs mois de préparation et il est ainsi nécessaire pour les entreprises qui préparent ce type d’opération d’agir lorsque le moment est favorable afin de gagner la confiance des investisseurs. Couplé à de faibles taux d’intérêts et une reprise rapide de l’activité économique, le climat favorable des marchés financiers en 2021 a ainsi permis d’atteindre un nombre d’IPO et un volume d’émission jamais vu depuis l’an 2000.
Tous les secteurs n’ont cependant pas été concernés au même niveau. C’est avant tout le secteur de la tech qui a mené la danse, si bien que parmi les dix plus grandes IPO de 2021 en termes de montants levés, toutes concernent des entreprises de la tech, ou fortement liées au secteur. L’entreprise de télécommunications China Telecom a ainsi émise pour 7,4 milliards de dollars d’actions lors de son IPO. Krafton, entreprise sud-coréenne de développement et d’édition de jeux-vidéos qui développe désormais des projets autour des NFT et du métavers, a elle réalisée une opération chiffrée à hauteur de 3,8 milliards de dollars.

Un net ralentissement des IPO au premier trimestre 2022
Comme l’évolution des IPO est grandement corrélée à la confiance des investisseurs et plus généralement aux tendances des marchés financiers, l’instabilité qui s’est installée en ce début d’année a été le synonyme d’un net ralentissement du rythme des IPO. En conséquence, le premier trimestre 2022 a vu le nombre d’IPO baisser de 37 % par rapport au premier trimestre 2021, selon le rapport trimestriel des introductions en bourse d’EY. Le montant mondial des fonds levés a lui baissé de 51 %.
Selon ce même rapport d’EY, la volatilité des cours a été multipliée par deux lors du premier trimestre. Pour cette raison, les entreprises préparant une introduction en bourse préfèrent attendre que les marchés retrouvent une certaine stabilité et que les investisseurs reprennent confiance. La guerre en Ukraine ainsi que la conjoncture économique sont venues briser la tendance haussière de 2021.
Quelles performances pour ces entreprises après l’introduction en bourse ?
Le montant record levé lors des IPO en 2021 doit cependant être relativisé. En effet, 57 % des IPO de 2021 ont sous-performé au 31 décembre 2021 à l’échelle internationale, pourcentage qui s’élève même à 80 % aux Etats-Unis. La confiance des investisseurs s’est réduite dès le second semestre 2021 lorsque les marchés actions sont devenus plus instables.
Mais ce phénomène n’est pas nouveau et se retrouve aussi à moyen terme. Jay Ritter, professeur de finance au Warrington college of Business, a montré qu’entre 1980 et 2018 les actions des entreprises qui ont été introduites en bourse aux Etats-Unis ont fait état d’une performance inférieure de 17 % à la performance du marché au bout de trois ans après l’introduction.
La performance du cours après IPO dépend généralement de la capitalisation de l’entreprise. En France, les entreprises capitalisées à plus d’un milliard d’euros lors de l’IPO ont vu leurs cours augmenter dans 62 % des cas entre 2014 et 2019, alors que seulement 22 % des entreprises capitalisées à moins de 100 millions d’euros au moment de l’IPO ont vu leurs cours augmenter. La raison principale à cela est que les grands gestionnaires de fonds ne suivent généralement pas les IPO des entreprises à capitalisation plus faible, qui ont un modèle économique moins développé.
Il est également à noter qu’il n’y a pas que des entreprises avec une activité opérationnelle qui réalisent des IPO. Il existe aussi des SPAC (Special Purpose Acquisition Company) qui sont des sociétés sans actifs ayant pour but d’acquérir une entreprise cible non cotée. L’introduction en bourse est ainsi le moyen de financer cette acquisition. Il s’agit pour l’entreprise cible d’un moyen alternatif, rapide et moins coûteux pour s’introduire en bourse. Au premier trimestre 2021, ces SPAC ont représenté 30 % des introductions en bourse. Ce type d’opération est cependant considéré par beaucoup d’investisseurs comme spéculatif et trop risqué.